Création de la monnaie Eco : l’inquiétante passivité des députés ivoiriens

Article : Création de la monnaie Eco : l’inquiétante passivité des députés ivoiriens
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23 janvier 2021

Création de la monnaie Eco : l’inquiétante passivité des députés ivoiriens

A quoi servent nos députés en Côte d’Ivoire ? Cette question revient sur toutes les lèvres depuis plusieurs années. Le désintérêt de ces élus pour des questions de premier ordre comme la création de l’Eco, remplaçante du Franc CFA, confirme qu’ils sont tout, sauf des représentants du peuple.

Le président ivoirien Alassane Ouattara se fait aujourd’hui passer pour l’initiateur de la réforme du Franc CFA. Mais qu’on ne s’y trompe pas. C’est bien Emmanuel Macron qui a pris sur lui la responsabilité de mettre fin à cette monnaie, héritée de la colonisation. Il répondait ainsi à une vieille aspiration de la jeunesse africaine et des leaders panafricanistes : donner aux anciennes colonies leurs souverainetés monétaires.

C’est donc le chef d’Etat, d’un pays censé profiter du Franc CFA, qui a sonné le glas de cette devise. Quel paradoxe, quand les dirigeants africains sont restés jusqu’ici de marbre face aux revendications de leurs populations. Pire, ils empêchent les activistes de s’exprimer, comme ce fut le cas en 2019 à Abidjan, lors d’une manifestation d’Urgences Panafricanistes, du polémiste Kemi Seba. Une réaction incompréhensible voire honteuse de la part des autorités ivoiriennes.

Un travail de fond à l’hémicycle français

Non seulement c’est la France qui a pris l’initiative de mettre fin au Franc CFA, sous la pression de la jeunesse africaine (elle n’y était pas obligée), mais c’est encore elle qui pilote le processus de création de la nouvelle monnaie. En effet, l’ancien colonisateur a soumis à son parlement la transformation en Eco du Franc CFA, des pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Il y a eu d’abord un passage en Commission des finances au Sénat, puis un examen par une Commission des affaires étrangères, et enfin un passage en séance publique à l’Assemblée nationale. Une dernière étape qui actera la ratification, le 10 décembre 2020, de l’accord de coopération monétaire signé en décembre 2019 entre la France et les états membres de l’UEMOA.

Le Franc CFA, un sujet éludé au parlement ivoirien

Ce nouvel accord confirme le changement symbolique du nom de la devise, et le retrait de la France des instances de gouvernance de la zone. Il confirme aussi la suppression de l’obligation de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) de déposer la moitié de ses réserves de change auprès de la Banque de France. Mais une chose reste inchangée : l’indexation de la devise sur le cours de l’euro. Actuellement 1 euro équivaut à 655,96 francs CFA. Passons…

Tandis que les élus français effectuent un travail de fond sur la nouvelle monnaie ouest-africaine, il n’y a pas un seul parlement de la zone qui a daigné se pencher sur ce dossier. Même le comité interparlementaire de l’UEMOA et la BECEAO restent inactifs. Tout se passait comme si la question n’intéressait pas nos députés et dirigeants. On laisse la France faire ce que bon lui semble. Personne ne devrait donc s’étonner de voir bientôt les Africains critiquer à nouveau cette monnaie.

Des intérêts opposés à ceux de la population

Pour un sujet aussi important que la souveraineté monétaire, nos parlementaires devraient faire preuve de plus de responsabilités, s’ils se considèrent vraiment comme des représentants du peuple. Mais l’ont-ils une fois été, ces dernières années ? Non évidemment ! Rappelons-nous de leurs positions sur le prix de la carte nationale d’identité (CNI). Alors que les Ivoiriens réclamaient la gratuité de ces pièces, nos élus se sont battus pour qu’elles coûtent 5.000 Francs CFA. Curieuse façon de représenter la population.

A quoi servent donc nos députés, grassement payés avec nos impôts ? À rien ! Les Ivoiriens ont toujours été les derniers de leurs soucis. Savez-vous leurs préoccupations principales ? Eh bien défendre vaille que vaille leurs chapelles politiques et leurs juteux sièges. Le 6 mars prochain, ils se donneront encore les moyens de rester en place pour « manger » aussi longtemps que possible.

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